Avez-vous vous remarquez les subtilités des musées d’arts ?

Au musée de Lyon, les cartels et œuvres côtoient des photocopies agrandis de pages d’un livre nommé Fiction. Police de caractère de taille 14, de style Dubaï, Arial ou Time.

Time, time, temps. Notion de temps. Vous avez l’opportunité de lire en même temps que d’observer. Si on en croit les statistiques du visiteur : la lecture informative est proportionnelle voire supérieure au temps d’observation des œuvres d’arts. Si nous ajoutons la lecture de fiction, le temps du spectateur dans le lieu va doubler voire tripler selon le trouble : dyslexique, dyspraxiste, dysphasique, dysproportionné, dyslentique, dysillusionniste, dysintimique, dysfonctioniste, dystobolaire, dysordine, dysendix.

Judicieuse mise en œuvre de la gestion du regard du spectateur.  Subtil trompe l’œil. Si par trompe l’œil nous nous attendions à voir Père Borrell del Caso, Fuyant la critique, nous serons ravis de voir comment l’artiste/commissaire nous implique dans un jeu d’illusions d’optique. Nous nous disputons alors un morceau de texte à trois, voire à quatre paires d’yeux tout en essayant de souffler sur les mèches de cheveux du voisin de devant, évitant le retour d’haleine de celui de derrière. Et hop, time, time, temps, nous voilà plongé dans un souvenir commun : la célèbre bataille du jeter de regard du Louvre face à La Joconde.

Au musée d’Angers, vous n’oublierez jamais votre lecture de cartels. Si vous les trouvez. « Les cartels sont loin des œuvres afin de pouvoir les prendre en photo » (les œuvres) m’explique la gardienne.

Ici les gestionnaires d’espaces s’interrogent davantage sur la notion du corps du spectateur et son rapport à l’information écrite. Ainsi, la lecture de cartels nécessite un pencher du corps de 75°(technique la plus courante) afin d’emmener notre regard proche des griffes de l’explication. La taille et le type des caractères sont de l’ordre du 10 Atlas. Si par Atlas nous pensons à répertoire et étude de vastes étendues, la police des caractères typographique en 10 nous interroge à priori sur notre rapport à l’œuvre. Me voilà surprise une fois de plus par l’ingéniosité du commissaire/artiste.

N’est-il pas judicieux de créer une série d’œuvres interactives impliquant le corps du visiteur ? Les œuvres Cartels sont proche d’Une minute, sculptures d’Erwin Wurm. En effet vous allez être surpris des multitudes de postures sculpturales que vous allez pouvoir adopter le long de votre visite.

Aussi, vous pourrez apercevoir au bout d’une grande salle une écriture de taille 48 lisible de loin. Il est écrit Esquisse de Ingres en blanc sur un mur de couleur vert saumon. Elle laisse une ouverture sur une salle de taille équivalente à une chambre de type formule 1 standard avec en prime un éclairage rudimentaire.

Attention tout de même, le Louvre et l’histoire de sa Joconde peut vous revenir en tête. Et l’idée d’emprunter un ou deux exquis de Ingres dans cette pièce sans surveillance peut soudainement naître en vous.

Comme ça m’est arrivée il y a une quinzaine de jours.

Après élaboration du stratège : remplacement d’un Ingres par une esquisse griffonnée à la volée, j’ai pu facilement démunir le vieux cadre du 19ème.

De retour dans mon salon, je me suis empressée de le ré-encadré d’un pourtour Ikea et d’annoncer l’heureux évènement sur les réseaux sociaux : Venez vite voir une authentique œuvre d’Ingres (photo à l’appui). Un blogueur me répondit quelques minutes plus tard. Est-ce que je peux venir authentifier votre TG ? Voulez-vous dire le dessin de JADI ? Mademoiselle l’esquisse est un TG, un Théodore Géricault. C’est sans nul doute toute la subtilité de la série d’œuvres Cartels du musée d’Angers. L’artiste/commissaire décale les cartels d’une œuvre à une autre afin de définir une nouvelle lecture des pièces artistiques. C’est véritablement ingénieux. Si vous avez l’occasion de venir voir l’Esquisse d’Ingres de Théodor Géricault conceptualisé par le musée d’art d’Angers en Aout 2017, mon salon reste ouvert aux horaires des musées Nationaux.