James Lee Byars mettant en scène sa propre mort dans cette œuvre créée en 1994, The Death of James Lee Byars, c’est l’installation actuellement visible dans l’église de Santa Maria della Visitazione, aux Zattere à Venise dans le cadre des événements collatéraux de la 58ème biennale internationale d’Art.
Un parallélépipède immense entièrement recouvert de feuilles d’or d’environ six mètres sur cinq et presque cinq mètres de hauteur, est installé à l’intérieur de la nef centrale, ouvert frontalement face à l’autel. Au centre de cet espace un tombeau, le sien, également doré à la feuille. L’œuvre première a également été en son temps une performance durant laquelle l’artiste s’allongeait immobile dans un espace jonché de feuilles d’or, jouant et anticipant par là-même sa propre mort. L’or, matériau de prédilection par excellence de l’artiste charge les lieux à la fois de préciosité et de sacralité mais revêt aussi une allure fragile et éphémère due à l’immanquable analogie avec un paysage automnal jonché de feuilles mortes soulevées par le vent (ventilateur). Il s’agit d’une métamorphose celle de la transformation de la matière, éternel recommencement de la mort donnant la vie dans un cycle sans fin. Ici le contenant, l’église, contenant un contenu, le parallélépipède, lui-même contenant un contenu, la mise en scène de la mort de l’artiste avec la sépulture devenant elle aussi contenant de l’ultime contenu, symboliquement le corps de l’artiste. Mise en abyme, donc. On retrouve la mystique religieuse chère à Byars. Une mystique redoublée voire exacerbée puisque l’église de la visitation est aujourd’hui encore un lieu de culte « consacré », mais aussi parce que l’installation sonore de l’artiste Zad Moultaka dialogue de façon un peu trop redondante avec celle de James Lee Byars. Nous sommes face à une sur-théâtralisation de la mort, car la mort est toujours événementielle. Beaucoup d’artistes ont travaillé ou travaillent sur ce thème, on pense bien sûr à Boltanski et à la dimension mystique et grave de ses mises en scène, mais peu d’artistes me semble-t-il, ont abordé la mort sous l’aspect de la banalisation. La mort comme l’aboutissement logique de la vie, comme une étape normale et infime dans le cycle infini de l’univers. En réfléchissant sur les artistes qui ont pu à un moment donné dans leur travail banaliser la mort, vient à l’esprit l’artiste Unglee et ses articles nécrologiques fictifs, ses « disparitions » répétées annonçant à chaque fois sa propre mort et publiés dans diverses revues d’art dans les années 90. Désacralisation ou démystification de l’événement mais aussi exploitation ironique de la spectacularisation de la mort qu’entretiennent les médias surtout lorsqu’il s’agit de personnalités publiques.